Le point sur

Les tissus à base de plastique recyclé sont-ils écolos ?

De plus en plus de marques adoptent le polyester recyclé.

La marque Hopaal utilise un mélange de fibre de coton et de polyester recyclé.

Ecrit par Déborah de Mon Quotidien Autrement

Coton bio, lyocell, lin, tissus à base de plastique recyclé…. Dans la jungle des textiles, il est parfois difficile de s’y retrouver. Et pourtant, nos choix vestimentaires sont loin d’être sans importance. Les quelque 100 milliards de vêtements vendus chaque année génèrent à eux seuls 1,2 milliard de tonnes de CO2. Soit environ 2% des émissions mondiales. D’ici 2050, le secteur pourrait même émettre 26 % des rejets de gaz à effet de serre dans le monde, si les tendances de consommation restent inchangées. Et le pire, c’est que 80 % de ces vêtements finissent à la poubelle, avant d’être enfouis ou incinérés.

La reine des fibres textiles est aujourd’hui encore le polyester. Résistance, faible coût de production, le polyester a de nombreux avantages. Mais cette fibre, issue de la pétrochimie, n’est pas la plus vertueuse, en matière de climat. De grands acteurs du secteur se sont néanmoins engagés pour faire pencher la balance du bon côté. De plus en plus, ils utilisent du polyester recyclé. H&M, Patagonia, Adidas, Puma… tous s’y mettent. Les fibres issues de plastique recyclé constituent aujourd’hui 14 % du polyester utilisé dans la mode, selon le 2020 Preferred Fiber and Materials Market Report. Mais l’objectif de l’ONG Textile Exchange est par exemple de porter la part du polyester recyclé à 45 % d’ici 2025.

Comment fait-on des tissus à base de plastique recyclé ?

La majorité du polyester recyclé est actuellement fabriqué à base de bouteilles plastiques. Pour fabriquer un t-shirt, il faut compter environ l’équivalent de cinq bouteilles de soda. Ces déchets plastiques sont collectés, avant d’être triés, puis nettoyés. Il existe ensuite deux méthodes pour recycler le plastique. La méthode mécanique : les bouteilles sont broyées, jusqu’à ce qu’elles soient réduites en toutes petites paillettes de plastique. Ces paillettes sont ensuite fondues et filées, pour devenir une fibre textile. Ou la méthode chimique : à l’aide d’additifs, les bouteilles sont décomposées en composants chimiques élémentaires du Pet, puis reformer en nouveaux polymères, qui sont ensuite transformés en fibres.

Une évolution bénéfique de la mode…

Mais ce nouveau textile est-il vraiment écologique ? En termes d’empreinte carbone, le polyester recyclé est plus vertueux que le polyester classique. Pour chaque kilo de polyester recyclé de manière mécanique, 70 % d’émissions de CO2 sont économisées, car le process de fabrication est moins gourmand en eau et en énergie et ne nécessite par d’extraction de pétrole supplémentaire. « Pour rester dans la trajectoire des 1,5 degrés recommandée par le Giec, nous devons faire passer la part de fibres recyclées mécaniquement sur le marché du polyester de 14 % à 90 % d’ici 2030 », estime Textile Exchange.

Selon une étude de l’Ademe, l’utilisation de polyester recyclé (recyclé par voie mécanique) entraine une diminution de 14 % des émissions de particules, de 91 % des risques d’eutrophisation* ou encore une baisse de 39 % des indicateurs de changement climatique. Elle permet aussi de réduire de 46 % des risques d’épuisement des ressources minérales et fossiles.

Par ailleurs, de plus en plus de grandes marques s’engagent, en parallèle, contre la pollution au plastique, notamment des océans, en vue de produire du Pet recyclé (rPet). En partenariat avec l’ONG Parley for the Oceans, Adidas a par exemple repêché l’an dernier 5000 tonnes de plastique marin. Repreve, un fabricant de fibre en rPet, qui fournit des marques telles que Gap ou The North Face, a dépassé en 2020 les 20 milliards de bouteilles récupérées dans les décharges et sur le littoral. En Europe, le projet Seaqual Initiative a transformé 99 tonnes de déchets marins en fibres textiles…

…qui a ses limites

Pourtant, le rPet n’est pas une solution miracle pour rendre la mode plus responsable. Même s’il est plus vertueux que le processus de fabrication du PET vierge, le process de production du rPet reste assez gourmand en eau, en énergie et en nouveaux intrants, en particulier lorsqu’il s’agit du recyclage chimique, dont l’empreinte carbone est moins bonne que le recyclage mécanique.

Par ailleurs, le rPet ne règle pas la problématique des microfibres de plastique relâchées à chaque lavage dans les océans. Chaque année, 500 millions de tonnes de microfibres seraient ainsi relâchées dans les océans. Les études manquent cependant encore sur l’impact du rPet sur cette variable.

Enfin, le polyester recyclé est souvent mélangé à d’autres fibres, comme l’élasthanne par exemple, lors de la conception des vêtements. Or, les fibres mélangées sont encore très complexes et coûteuses à recycler. Le rPet est donc loin d’être recyclable à l’infini.

Dans notre article Cent milliards de vêtements vendus dans le monde par an, en quelques lignes, des chiffres sur la surconsommation de vêtements et des solutions.

*L’eutrophisation implique une hausse importante des nutriments, combinée à une baisse de l’oxygène dans les milieux humides, ce qui entraîne une dégradation des écosystèmes et favorise notamment la prolifération d’algues.

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    1. @ Séve. Merci pour votre message. En matière de tissus, c’est difficile de trouver une solution 100 % écolo. Le coton, même lorsqu’il est bio, consomme beaucoup d’eau. Les nouveaux tissus à base d’eucalyptus doivent subir une transformation chimique. Si le sujet vous intéresse, nous vous invitons à lire les 2 autres articles que nous avons faits sur le sujet : https://www.labouscule.com/dossiers/lyocell-pinatex-modal-nouveaux-textiles-fibres-tissus-artificiels-ecologique/ et https://www.labouscule.com/chiffres/cent-milliards-de-vetements-vendus-dans-le-monde-par-an/

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