Entretien

Homme au foyer : «Tu ne vas quand même pas faire le ménage ? »

Anecdotes et préjugés : un homme au foyer nous raconte son expérience.

Un homme au foyer à la conquête du monde, de William Quentin

Ecrit par Déborah de Mon Quotidien Autrement

Durant un peu plus de deux ans, William Quentin a été homme au foyer. Une situation encore peu courante en France (et ailleurs) et pas toujours bien acceptée socialement. Il a raconté son expérience dans un livre  » Un homme au foyer à la conquête du monde « . Interview. 

Pourquoi avez-vous décidé de devenir homme au foyer ?

William Quentin : Ce n’était pas prévu au départ. Ma femme et moi avions envie d’avoir une expérience de vie à l’étranger, avec nos enfants. On s’était dit : on part dès que l’un de nous trouve une opportunité professionnelle. Ce fut mon épouse. Nous avons déménagé à Cracovie, en Pologne, pour deux ans et je suis devenu un homme au foyer par la force des choses.

Quel regard votre entourage a-t-il porté sur cette décision ?

W.P. : J’ai reçu pas mal de remarques insinuant que j’allais me la couler douce, que j’avais tiré le gros lot, que j’allais avoir la belle vie. Certains hommes m’ont demandé ce que j’allais faire de mes journées, si je n’allais pas m’ennuyer, alors qu’ils n’avaient probablement jamais posé cette question à leur propre femme. D’autres se sont étonnés, me disant que je n’allais quand même pas faire le ménage ! Ma maman, elle, ne voulait pas que je consacre entièrement mon temps à ma famille, alors même qu’elle a été femme au foyer toute sa vie. Elle estimait que ce n’était pas fait pour moi.

Comment vous êtes-vous adapté à cette nouvelle situation ?

W.P. : C’était assez déroutant. Non pas parce qu’on est inactif lorsqu’on est au foyer. On a beaucoup de choses à faire. Auparavant, nous nous partagions les tâches ménagères plus ou moins équitablement avec ma femme. Lorsque j’ai arrêté de travailler, elles me sont toutes revenues : les enfants, le ménage, les courses, la cuisine, alors même que jusqu’alors, je ne cuisinais pas. Cela dit, le rythme de vie est tout de même plus cool. On n’est pas soumis à la même dose de stress.

Quels aspects n’aviez-vous pas anticipés ?

W.P. : J’avais sous-estimé le côté assez ennuyeux de ces tâches répétitives, peu valorisantes et peu créatives. On n’est pas gratifié pour la réalisation de ces tâches. On vous dit rarement « Oh, comme tu as bien passé l’aspirateur ! ». J’avais également minimisé la facette des relations sociales. La vie d’un homme au foyer est assez solitaire. Il est parfois difficile de partager ce qu’on vit avec d’autres parents au foyer. Ce sont presque exclusivement des femmes, qui se retrouvaient pour un café ou d’autres activités dans lesquelles je ne me reconnaissais pas. Quant aux hommes, ils travaillent la semaine, en journée et nos préoccupations étaient nécessairement différentes.

Pensez-vous qu’il aurait été plus facile d’être un homme au foyer en France ou en Belgique ?

W.P. : Au contraire ! Quand on est un homme au foyer, on doit justifier du fait qu’on ne travaille pas. A l’étranger, j’avais une bonne excuse : j’avais suivi ma femme. En France ou en Belgique, cette situation est encore peu acceptée socialement. Pour qu’un homme arrête de travailler, il faut qu’il soit malade ou ait été viré.

Avez-vous cependant l’impression que la situation évolue ?

W.P. : En effet. Je suis désormais de retour en Belgique et j’ai repris mon travail. Lorsque j’en discute avec certains de mes collègues plus âgés, ils me racontent qu’à leur époque, ils n’auraient même pas pu s’imaginer lever le pied pendant que leur femme faisait carrière. En trente ou quarante ans, tout cela a beaucoup changé. Les hommes au foyer sont plus nombreux aujourd’hui. Mais la tendance est tout de même loin de s’être inversée.

Auriez-vous pu envisager être homme au foyer sur le long terme ?

W.P. : Non, je ne pense pas. Avoir un emploi est source de valorisation, de reconnaissance. C’est une chose à travers laquelle on se définit. D’ailleurs, dès qu’on rencontre une personne nouvelle, on lui demande ce qu’elle fait dans la vie. Lorsque j’étais homme au foyer, je répondais que j’avais suivi ma femme à l’étranger. Mais je n’étais alors défini que via ma relation avec ma femme et son activité. J’ai eu la chance de pouvoir vivre cette expérience comme un long congé parental. Il est d’ailleurs dommage qu’il soit encore si difficile pour les hommes d’en obtenir.

  1. Bonjour 🙂

    Mon fils est homme au foyer il a 3 enfants dont 2 jumeaux, mais en plus il travail le soir dans un barre 🙂

    1. Bonjour Jackie. Merci pour votre témoignage et bravo à votre fils ! Bonne journée.

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